L'INGÉRENCE
SÉLECTIVE : GÉNOCIDES INVOLONTAIRES AU SERVICE DU
CAPITALISME
L'ère du temps serait-elle de nouveau à "
l'ingérence humanitaire ", à l'aide
aux opprimés quand ceux qui les oppriment ne sont pas trop
forts et pas trop nos amis?
Il faut bien le croire puisque l'annonce du massacre de civils albanais
au Kosovo par les forces serbes a soulevé une marée
de protestations belliqueuses appelant à la défense
du Droit et des droits de l'homme par les armes. Il y aurait tant
à dire de ces passionnés intermèdes de la conscience,
qui voient subitement les grands de ce monde monter aux meurtrières
de l'indignation, et l'OTAN se muer en un ange vengeur de l'occident
"choqué " dans ses valeurs intimes. C'est un moment
d'exultation collective qui rappelle les prémices d'une croisade.
C'est une grand-messe absolutoire où la télévision
joue souvent le rôle du prêcheur sous le regard révolté
et bigot du paroissien dans son canapé. Un moment d'hypocrisie
aussi dans ce que l'hypocrisie a de plus laid et l'occident de plus
irritant.
Parce qu'on dit alors défendre à tout prix le droit
international et les valeurs universelles, Droit et valeurs qu'on
refuse aux victimes de ses alliés ou de ceux dont la situation
ne coïncide pas avec ses intérêts.
Parce qu'on dit vouloir porter l'attention de l'opinion publique
sur une cause juste, tout en jetant tant d'autres causes pas moins
justes, ou de conflits, dans un oubli à peine pavé
de commentaires lapidaires ou ignorants, ironiques ou inexistants
alors que dans le traitement des conflits qui veulent bien les intéresser,
nos media brillent souvent par leur furieux déchaînement,
leurs amalgames et leurs condamnations hâtives.
Parce que comme par hasard, les points du globe qui intéressent
les journalistes sont souvent ceux qui intéressent les dirigeants
de leurs pays, sans doute guère à cause d'un imaginaire
" complot politico-médiatique " mais plutôt
car ils sont ainsi assurés que viendra l'heure du grand show
militaire ou diplomatique, l'heure où ils sentiront que fouler
à la plume un pays à terre, honni des puissants, est
mois frustrant et plus rentable que combattre les moulins de l'indifférence
; ce qui explique que l'on parle plus des kurdes d'Irak
que des kurdes de Turquie qui n'ont pas eu la " chance ",
pour attirer l'attention des media occidentaux, de disposer de Saddam
Hussein.
Figures de style? Les exemples fourmillent qui montrent que l' ironie
n'est pas dans mon texte mais dans les faits. Eclipsés les
sahraoui, les karen, les chrétiens du Soudan et autres peuples
ou conflits si peu évoqués qu'en parler fait presque
sourire, ennuie, ou fait craindre l'étalage lassant d'un
goût pédant pour l'exotisme et le marginal. Il en est
d'ailleurs de même pour des conflits plus proches : pas si
loin en Turquie, l'un des meilleurs alliés de l'occident,
la deuxième armée de l'OTAN, emploie tous les moyens
y compris les déplacements de populations et la torture systématique
dans sa lutte contre les kurdes du P.K.K. , sans oublier l'occupation
du nord de Chypre et autres violations des droits de l'homme, d'une
façon qui au total dépasse en fureur et en dimension
ce qui se passe au Kosovo. Tout le monde s'en fout et la Turquie
fait même partie des pays qui... participent aux actions de
l'O.N.U. en Bosnie et appellent au respect des droits de l'homme
au Kosovo, sans que cela n'émeuve personne - que ce soit
parmi les media ou nos vertueux dirigeants. C'est que les cris de
certains sont voués à passer au second plan jusqu'à
ce qu'un changement de conjoncture fasse tourner dans leur direction
le vent des intérêts -qui pour beaucoup refusera toujours
de souffler.
On ne peut blâmer tout le monde pour ces évidences
que si peu se lassent d'ignorer. On ne peut connaître ni s'intéresser
à tout (ce qu'illustre le choix même des exemples dans
ce texte). Mais l'attitude des journalistes censés informer
de tout, et celle de certains intellectuels qui font leur pain avec
ces luttes sélectives pour la dignité humaine, peuvent
être sujet à " interrogations ". Les chefs
d'Etat quant à eux pensent bien sûr avant tout à
la sauvegarde des intérêts nationaux. Toutefois deux
questions se posent alors : d'abord celle de savoir si leur attitude
favorise autre chose que de simples intérêts contingents
- le " sacrifice " serait vain diraient les cyniques.
Ensuite, celle de l'utilisation abusive, par les pays occidentaux,
de certaines valeurs dans le seul but de préserver des intérêts
qui sont étrangers à ces valeurs. Il s'agit de cette
tare malsaine de la politique internationale qui consiste, pour
servir ses propres intérêts, à prétexter
la défense zélée des droits de l'homme en intervenant
dans un pays donné via un prétendu " droit d'ingérence
". Alors que, sous des montagnes d 'hypocrisie et de prétextes
on ferme les yeux sur les violations qui ont lieu partout ailleurs
y compris dans son propre " camp " et que l'on serait
parfaitement en mesure de stopper, ou en tout cas de condamner autrement
qu'à mots couverts. On semble pourtant se complaire dans
cette indécente comédie. Mieux vaudrait que
l'occident jette le masque…
Leur condamnation à l'indifférence serait déjà
moins amère aux peuples qui courent derrière leurs
" droits " comme derrière un mirage. L'ingérence
sélective - notent les sahraoui: le Sahara occidental, depuis
1975, est l'objet d'une lutte armée entre une organisation
sahraoui, le front Polisario, qui demande l'indépendance
du peuple sahraoui, et le Maroc qui considère cette région
comme une partie de son territoire. Ancienne possession espagnole,
le Sahara occidental fut partagé en 1976, après le
départ des espagnols, entre le Maroc au nord et la Mauritanie
au sud. La Mauritanie et le Front Polisario se sont affrontés
jusqu' en 1979, date à laquelle la Mauritanie a renoncé
au Sahara occidental. Le Maroc et le Front Polisario ont quant à
eux continué à s'affronter mais ont récemment
accepté qu'un référendum organisé par
l'O.N.U. après le recensement du peuple sahraoui, règle
la question de son autodétermination, ce qui mettrait fin
à la lutte inégale entre les combattants sahraoui
et l'armée marocaine.
les karen: en Birmanie plusieurs minorités ethniques s'opposent
au pouvoir central birman. Parmi elles, entre autres, les Karen,
les Môns, les Kachins...
Les chrétiens du Soudan: depuis plusieurs
décennies les populations du sud-Soudan, en majorité
chrétiennes, sont en rébellion contre le gouvernement
islamiste soudanais. Quelques combats se déroulent également
dans le nord et l'est du pays. La répression sévère
de Khartoum est aujourd'hui endiguée par " l'armée
de libération des peuples du Soudan " qui mène
la rébellion.
P.K.K.: "partia karkaren Kurdistan":
le "parti des travailleurs du Kurdistan" réclame
l'indépendance du Kurdistan et est en lutte ouverte contre
l' "occupant turc" -selon ses termes- depuis 1984. Ses
actions se situent essentiellement sur le territoire turc, bien
qu'il possède des bases en Irak et en Syrie (bases dont le
maintien est compromis); elles prennent soit la forme de combats
directs contre l'armée turque, soit la forme d'attentats.
Le gouvernement turc brûle systématiquement et chasse
les habitants des villages kurdes soupçonnés de soutenir
le P.K.K. ou qui refusent de constituer une milice locale anti-P.K.K..
Chypre: depuis 1974 l'armée turque occupe
le nord de Chypre qu'elle a vidé par la force de ses habitants
chypriotes grecs (en 1975 la Turquie avait en plus imposé
que les chypriotes turcs vivant au sud gagnent le nord de l'île,
créant ainsi deux zones "ethniquement pures") ;
de nos jours elle conforte cet état de fait par l'apport
massif de colons venus de Turquie et la présence d'un corps
d'armée. L'origine réelle du conflit remonte aux années
50, quand Chypre était encore colonie britannique: c'est
à cette époque que les turcs eurent l'idée
d'un partage de l'île et de la création au nord d'une
zone "turque" pour contrer la volonté des chypriotes
grecs (qui représentent 82% de la population de l'île)
de se rattacher à la Grèce. La proclamation de l'indépendance
de l'île en 1960 n'avait pas détourné les parties
de leurs ambitions respectives. La Turquie avait préparé
le partage et l'intervention de 1974 en mettant en place des milices
chypriotes turques, bras armé de sa politique dans l'île
(et dont l'action eut pour conséquence des affrontements
sanglants et des atrocités impliquant les deux communautés
de l'île - affrontements qui connurent leur paroxysme dans
les années 60).
Nemo.
THE
VIOLENCE OF MODERN ECONOMIC SYSTEM
By ìmodern economic systems,
I refer to modern capitalism, which took root in the western world
about the time of the crusades:The first big growth phase [of capitalism]
was in the twelfth century. Then the popes appealed for sacrifices
for the crusades against Islam, and gigantic sums of money flowed
into Italy, and thus into the banking houses of Venice, Florence,
Genoa and Milan. They lent the money for armies which had
to be supplied with the equipment they needed before sailing from
Venice....
This system of debt was the central actor in the conquest of the
Americas after 1492. The kings of Europe were captive to a
fever for gold because they were heavily indebted to the international
bankers:Written with particular clarity and detail is Fernando Miresís
book In the Name of the Cross. Genocide against the Indians
during the Spanish Conquest: Theological and Political Discussions.
We have always assumed that the main actors were the kingdoms of
Spain and Portugal. But Mires shows that they were only ìjunior
partnersî, even instruments of the capital-owning families
of, above all, Upper Italy and Upper Germany which with their help
concentrated on money-making (accumulation of capital) through universal
expansion. The riches stolen from Latin America ended up mainly
in their treasuries....
The genocides of the Americas were driven by debt and enabled by
the power of firearms. Peoples who did not participate
in the system were conquered and exploited to service the debt system;
peoples who resisted were destroyed. The insatiable demands
of debt will not allow non-cooperation:· ...the Paraguayan
[Jesuit] missions..., in little more than a century and a half (1603
- 1768)..., fully justified the aims of their founders. The
Jesuits used music to draw in Guaraní Indians who had sought
shelter in the forest, and who had stayed there rather than join
in the ìcivilizing processî of the encomenderos and
landlords. Thus 150,000 Guaranís were able to move
back into their primitive community organization and revive their
traditional arts and crafts. The latifundio system was unknown
in the missions; the soil was cultivated partly to satisfy individual
needs and partly to develop projects of common concern and to acquire
the necessary work tools, which were common property. The
Indiansí life was intelligently organized; musicians and
artisans, farmers, weavers, actors, painters, and builders gathered
in workshops and schools. Money was unknown; traders were
barred from entering and had to transact any business from hotels
at an appropriate distance.
The Crown finally succumbed to the criollo encomenderosí
[financiers] pressure and the Jesuits were expelled from Latin America.
Landlords and slave traders went in pursuit of the Indians.
Corpses hung from trees in the missions; whole communities were
sold in Brazilian slave markets. Many Indians took to the
forest again. The Jesuitsí libraries were used to fuel
ovens or to make gunpowder cartridges.
• From the 1890's to the 1920's, King Leopold of Belgium enriched
himself from Congo rubber production. The Congolese people,
the workers for this industry, were brutally sacrificed to enrich
the king. A common punishment was to chop off the hands of
unproductive workers. Ten million people were murdered, worked
to death, starved to death or mutilated in the process.
• In 2000, the AIDS epidemic in certain regions of Africa
threatens to wipe out over 10% of the population. Drugs which
prevent AIDS deaths are manufactured cheaply in Africa to save these
millions of lives. U.S. pharmaceutical firms, demanding their
patent rights for these drugs (many of which were developed with
public money and handed over to the corporations for distribution
and profit), pressure the Clinton administration to stop the cheap
production and sale of these drugs, which the pharmaceutical firms
have been able to sell for ten times the cost of production.
Thousands ñ perhaps millions ñ die so that these companies
may retain their profit margins.
It is always assumed that the violence of these economic enterprises
an unfortunate side effect which some day will be avoided as the
economic system matures. It is a central thesis of this paper
that the violence of this system is not in fact incidental, but
fundamental, to it. I believe it can be shown that economic
structures are rooted in the primitive sacred (the violence of which
was also once assumed -- before Girardís work ñ to
be incidental rather than fundamental). Toward this end, in
this essay, I introduce three central images as organizing images
for the analysis. The images are commodities, currency, and
the heap (of debt).
Britton Johnston
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